Bruxelles - Soutenu par l'Allemagne, honni par les Etats-Unis et le président Donald Trump, le projet Nord Stream 2 divise l'Europe depuis qu'il a été annoncé. Quels en sont les enjeux ?

Eviter le transit par l'Ukraine

Le gazoduc Nord Stream 2, dont la mise en service est prévue début 2020, a une capacité de 55 milliards de m3 par an, ce qui doit permettre de doubler les capacités du premier Nord Stream, qui transporte du gaz de la côte baltique de la Russie jusqu'à l'Allemagne.

Quatre des cinq pays dont les eaux sont traversées par le projet (Russie, Finlande, Suède, Allemagne) ont donné leur autorisation mais la procédure est toujours en cours au Danemark.

La route via la mer Baltique permet d'éviter de passer par l'Ukraine dont les relations sont extrêmement conflictuelles avec la Russie.

Après être devenue la principale voie d'approvisionnement début 2018, Nord Stream a vu sa place reculer dans l'acheminement du gaz russe à cause de travaux de maintenance (30%). Au troisième trimestre 2018, l'Ukraine était la voie principale, couvrant 48% du gaz venu de Russie, selon la Commission européenne.

Répondre à la demande européenne

Pour justifier le doublement de leurs gazoducs, les dirigeants de Nord Stream 2 avancent que dans les 20 prochaines années, l'UE aura besoin d'augmenter ses importations de 120 milliards de m3 pour répondre à une demande en hausse.

Le niveau des futurs besoins européens ne fait pas l'unanimité parmi les analystes, mais il est certain que les importations devront augmenter car la production domestique recule, selon l'analyste Thierry Bros, de l'Oxford Institute.

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Carte des tracés des gazoducs Nord Stream et Nord Stream II entre l'Allemagne et la Russie 

Alors qu'il est difficile d'augmenter les importations de Norvège et d'Afrique du Nord, la hausse viendra "du gaz russe et du gaz naturel liquéfié" (GNL), souligne l'expert.

En Russie, les exportations de gaz par voie terrestre sont le monopole de Gazprom.

Les importations de gaz dans l'UE viennent principalement de Russie (47% des importations au troisième trimestre 2018), puis de Norvège (34%), d'importations de GNL d'Afrique du nord (11%) et d'Afrique du Nord (8%).

Des Européens divisés

La Commission européenne reste très prudente sur le projet. Sans pouvoir s'y opposer, elle veut s'assurer qu'il est bien en ligne avec les règles du marché européen de l'énergie, en matière de concurrence notamment.

Sa proposition de réviser la directive gaz, afin de s'assurer que les gazoducs pénétrant sur le territoire de l'UE respectent également les règles du marché commun de l'énergie (transparence des prix, séparation des activités entre fournisseurs et gestionnaires des infrastructures), est considéré par de nombreux observateurs comme un moyen de mieux encadrer Nord Stream 2.

La Pologne et les pays de l'Est sont ceux qui se font entendre le plus contre le projet.

L'Allemagne en est le principal défenseur, ce qui lui a valu d'être la cible d'attaques virulentes du président américain.

L'analyste Marco Giuli, du think tank European Policy Centre (EPC) notait récemment que "les Etats-Unis ont toujours été opposés à ce projet, pointant une contradiction fondamentale de la politique allemande", à la fois engagée en faveur du régime de sanctions et qui "n'arrive pas à reconnaître la dimension politique de Nord Stream 2".

Le projet associe le géant russe Gazprom, majoritaire, à plusieurs entreprises européennes: les groupes allemands Wintershall et Uniper, néerlando-britannique Shell, français Engie et autrichien OMV.

Intérêt américain

Les Etats-Unis, grand producteur de gaz naturel, se sont récemment lancés dans une offensive commerciale à la recherche de nouveaux débouchés, soutenue par Donald Trump.

Mais jusqu'à présent, les exportations américaines se sont surtout dirigées vers les marchés sud-américains et asiatiques où les prix sont plus élevés.

Le Qatar reste le principal fournisseur de GNL à l'UE. La part du GNL américain a atteint 3% mais selon la Commission ces flux "depuis les Etats-Unis ont augmenté de façon tangible à la fin de 2018".

Par Marine Laouchez

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