Bruxelles - Au coeur des discussions entre l'Union européenne et le Royaume-Uni,  l'accès aux très poissonneuses eaux britanniques est vital pour les pêcheurs européens.

 

- Les règles du partage:

A l'origine, le Royaume-Uni possède, comme chaque Etat, une zone économique exclusive (ZEE) qui s'étend jusqu'à 200 milles au large de ses côtes. Dans le contexte communautaire, il a été décidé que ces zones sont mises en commun par les Etats membres de l'UE, entérinant une gestion commune.

Orchestrée par Bruxelles, la politique commune de la pêche (PCP) régit ces activités en Europe et le Royaume-Uni a accepté de l'appliquer en intégrant l'UE --participant jusqu'à cette année à la répartition des quotas aux pêcheurs de chaque pays pour les différents stocks.

Dans l'Atlantique du nord-est et la mer du Nord, une grosse centaines d'espèces sont ainsi en gestion partagée entre le Royaume-Uni et l'UE.

Un accès "restreint" existe par ailleurs pour plusieurs Etats européens à des zones situées dans les 6-12 milles marins au large des côtes britanniques, dans les eaux territoriales, en reconnaissance d'activités traditionnelles anciennes.

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Carte des zones économiques exclusives du Royaume-Uni et des pays voisins 

- Accès essentiel pour les pêcheurs de l'UE:

Les prises des pêcheurs de l'UE dans les eaux britanniques pèsent quelque 650 millions d'euros chaque année. Les flottes de huit pays de l'UE capturent au total 40% en valeur des prises effectuées dans la zone économique exclusive britannique, selon un rapport du Parlement européen. La Norvège y est aussi présente.

Un quart des prises françaises en volume (environ 20% en valeur) proviennent des eaux britanniques. La dépendance est encore plus forte pour la Belgique (50% de ses prises en valeur), l'Irlande (35%), le Danemark (30%) et les Pays-Bas (28%), selon des chiffres 2011-2015. Espagne, Allemagne et Suède sont aussi concernées pour une part moins importante.

Les principales espèces sont des poissons pélagiques (de haute mer): hareng, maquereau, merlan.... auxquelles s'ajoutent quelques espèces démersales (proches des fonds): sole, plie, lieu noir.

Au  niveau commercial, le Royaume-Uni exporte entre 60% et 80% de ses produits de la mer et l'UE absorbait l'an dernier presque 70% des exportations britanniques de poissons.

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Des pêcheurs sur le quai du port de Bridlington, dans le nord-est de l'Angleterre, le 11 décembre 2020

- Des eaux riches en poissons:

Les eaux britanniques sont riches en ressources halieutiques, du fait de mécanismes biologiques.

Les oeufs de poissons s'installent le long des côtes françaises et jusqu'au Danemark, zones nourricières car assez peu profondes et sableuses. "Quand ils deviennent adultes, ils partent vers les eaux un peu plus profondes, plus froides et plus oxygénées du nord", selon l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer). Soit dans les eaux britanniques.

Un phénomène accentué par le changement climatique et particulièrement sensible pour le cabillaud et la plie, espèces très présentes en mer du Nord.

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Des poissons fraîchement pêchés dans le port d'Ostende, le 20 octobre 2020 en Belgique

- Inquiétudes dans la dernière ligne droite:

Dernière offre britannique sur la table: que l'UE renonce à 25% à l'issue d'une période de transition de cinq ans et demi, après laquelle les règles d'accès réciproque aux zones de pêche seraient renégociées tous les ans

Reste de nombreuses incertitudes sur le périmètre: espèces sous quotas ou pas, problèmes d'accès...", et une renégociation annuelle qui empêchera toute visibilité et bloquera les investissements, selon l'organisation de pêcheurs française CNPMEM.

Le négociateur européen Michel Barnier a lui-même averti qu'il jugeait impraticable la demande britannique de renégocier chaque année: "Nous parlons de 100 espèces (partagées entre l'UE et le Royaume-Uni), pas de cinq comme avec la Norvège", avec qui l'UE ajuste ses règles annuellement.

Par ailleurs, les Britanniques ont dénoncé le principe des 6-12 milles et ne souhaitent plus reconnaître ces activités traditionnelles, en vigueur depuis des dizaines, voire des centaines d'années, ce qui est contesté par certains pays de l'UE qui souhaitent maintenir les principes de partage et de réciprocité prévus depuis 1964.

Par Julien Girault avec Nicolas Gubert à Paris

 

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