Bruxelles - A trois mois des élections au Parlement européen, la droite du continent et son chef de file Manfred Weber sont fragilisés par la campagne du populiste hongrois Viktor Orban contre le président de la Commission, Jean-Claude Juncker.

Dans les rues de Budapest, on pouvait voir mercredi des affiches montrant le visage de Juncker ricanant, non pas pour promouvoir l'UE avant le scrutin prévu fin mai pour renouveler le Parlement européen, mais pour reprocher à Bruxelles de soutenir l'immigration, a constaté l'AFP.

Problème: Orban, comme Juncker, appartiennent à la même famille du parti populaire européen (PPE), majoritaire au parlement européen. Il regroupe les formations de droite de l'UE, comme la CDU de la chancelière allemande Angela Merkel, son parti frère bavarois CSU ou les Républicains en France.

Dénonçant les "fausses informations" lancées par Budapest à propos de la politique de l'UE, le porte-parole de la Commission, Margaritis Schinas, a déploré cette campagne du gouvernement hongrois "qui dépasse l'entendement".

Quant au Luxembourgeois Juncker, il a répété ce qu'il avait déjà dit en octobre dernier: "Viktor Orban n'a plus sa place au sein du PPE".

Le discret Bavarois Manfred Weber, investi en novembre dernier chef de file du PPE pour le scrutin de mai, s'est quant à lui contenté de retweeter, sans aucun commentaire, la condamnation de la campagne hongroise par le président du PPE, le Français Joseph Daul.

"Je dénonce fermement les attaques hongroises et les conspirations sans fondement contre le Président Juncker", a écrit M. Daul, sans pour autant réclamer une exclusion du Fidesz, le parti de M. Orban, du PPE.

Le dilemme de Weber

Déjà critiqué pour son manque de charisme, M. Weber, grand connaisseur des institutions de l'UE mais sans aucune expérience gouvernementale en Allemagne, est confronté à un dilemme, alors que le PPE devrait perdre, selon tous les sondages, des sièges au prochain parlement européen, issu du scrutin de mai.

"Il est coincé. S'il ouvre le débat, il oblige tout le PPE à prendre position", analyse Eric Maurice, de la Fondation Schuman à Bruxelles. Et pour évincer le Fidesz du PPE, il faudrait des lettres émanant de la direction de sept partis membres du PPE qui demandent formellement sa sortie. Pour l'instant, il n'y en a pas eu une seule.

Même si de plus en plus de voix contre le dirigeant hongrois se font entendre. Gunnar Hökmark, chef de la délegation suédoise du Groupe PPE, a écrit personnellement à M. Weber pour l'exhorter à discuter du cas Orban "qui a dépassé les bornes" lors d'une réunion dès la semaine prochaine, selon une lettre obtenue par l'AFP.

Et Othmar Karas, tête de liste des conservateurs autrichiens (ÖVP) pour les élections européennes, mais pas chef du parti, a redemandé mercredi la suspension du Fidesz du groupe PPE.

Mais les réticences sont grandes côté allemand. "Si nous le mettons dehors, alors nous le jetons dans les bras de Salvini", a déclaré sous couvert d'anonymat un eurodéputé de la CDU.

Vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur, Matteo Salvini, le chef de la Ligue, un parti d'extrême droite, a déjà pris contact avec Viktor Orban et avec Marine Le Pen, la présidente du Rassemblement national en France, pour préparer des alliances après les élections européennes.

Sans le Fidesz, le PPE perdrait 12 de ses 217 eurodéputés actuels. Cela comptera pour le nouveau Parlement, ramené à 705 élus avec le Brexit, car plus de la moitié des voix sont nécessaires pour élire le futur président de la Commission.

Manfred Weber va devoir compter avec le bon vouloir d'autres groupes parlementaires pour réussir à prendre la tête de l'exécutif européen. "Et son manque de réaction rend encore moins légitime sa candidature aux yeux des Verts, des Sociaux-Démocrates et des Libéraux européens", remarque M. Maurice.

"Tout ceci accroît forcément les chances d'un candidat alternatif" non déclaré, estime-t-il. L'une des personnalités citées est le Français Michel Barnier (PPE), négociateur en chef de l'UE pour le Brexit.

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