Vienne - Des sondages au plus haut, une santé économique insolente, une opposition affaiblie: après un an de coalition, l'état de grâce se poursuit pour les conservateurs et l'extrême droite au pouvoir en Autriche, sur fond de multiplication de mesures anti-immigration et malgré quelques couacs diplomatiques.

Un contexte favorable

Avec une croissance économique de 3% attendue cette année et un des taux de chômage les plus bas de la zone euro (5,6%), le nouveau gouvernement surfe sur la bonne conjoncture européenne.Malgré la mise en place d'un bonus fiscal substantiel pour les familles et des hausses des retraites comprises entre 2 et 2,6%, les comptes publics doivent ressortir à l'équilibre cette année, un an plus tôt que prévu.

Comme pour les fonctionnaires, qui ont obtenu une augmentation de 2,8%, les salaires progressent de plus de 2,5% dans la majorité des branches, une hausse atteignant même 3,5% dans la métallurgie.

Une popularité intacte

Un an après son arrivée au pouvoir le 18 décembre 2017, la coalition voit sa popularité préservée, voire renforcée. Victorieux des législatives d'octobre 2017 avec 31,5% des voix, le parti conservateur ÖVP du jeune chancelier Sebastian Kurz a vu sa cote progresser régulièrement pour atteindre 35% dans les sondages.

Malgré une légère érosion, la formation d'extrême droite FPÖ du vice-chancelier Heinz-Christian Strache, qui avait recueilli 26% dans les urnes, compte toujours 24% de satisfaits, à des années-lumières de l'effondrement qu'avait subi ce parti lors de sa précédente entrée au gouvernement en 2000.

Un style apaisé

"Surtout pas de dispute". Après onze ans de tensions gouvernementales au sein de grandes coalitions entre sociaux-démocrates et conservateurs, ÖVP et FPÖ ont fait une règle d'or de ne jamais afficher de différends. "Cet effort visant à apparaître aussi unis que possible est très apprécié par l'opinion", note le politologue Fritz Plasser.

Le style posé de M. Kurz et le self-contrôle manifesté par M. Strache sont également portés au crédit de ces deux dirigeants. S'il évite tout écart de langage dans le vie publique, le dirigeant du FPÖ se voit cependant reprocher de relayer sur les réseaux sociaux des thèses complotistes et des messages stigmatisant les étrangers.

Des mesures implacables

Elue sur une plate-forme anti-immigration, la coalition a multiplié les mesures tant symboliques que pratiques: boycott du pacte de l'ONU sur les migrations, augmentation de moitié des expulsions de migrants déboutés de l'asile, fermeture de mosquées soupçonnées de salafisme, réduction des minimaux sociaux pour les demandeurs d'asile, indexation des prestations familiales sur le niveau de vie des pays de résidence des enfants...

Quitte, comme le relève le quotidien Kurier, à ce que l'ÖVP "sacrifie ses valeurs chrétiennes-démocrates". Et suscite l'incompréhension des milieux économiques, qui déplorent l'expulsion d'apprentis dont ils ont cruellement besoin.

Une opposition inaudible

A l'image d'un parti social-démocrate en pleine crise de leadership, l'opposition peine à se remettre en ordre de bataille. ONG, syndicats et intellectuels restent également discrets.

Même l'adoption au printemps d'une loi étendant à 12 heures par jour et à 60 heures par semaine la durée maximale de travail n'a pas durablement galvanisé les contestataires.

Prévue samedi à Vienne, une manifestation destinée à protester contre un an de politique gouvernementale doit réunir "des dizaines de milliers" de personnes, selon les organisateurs. Ils sont quelques milliers à prendre part chaque jeudi à des rassemblements de protestation près de la chancellerie.

Poutine, espions et dérapages

Alors que les ministres FPÖ s'efforcent de présenter un visage lisse et professionnel, pas un jour ou presque ne se passe sans qu'un dérapage sexiste, antisémite ou xénophobe ne soit attribué à des membres ou des cadres de ce parti.

Au gouvernement même, ce sont deux ministres FPÖ qui ont valu à Vienne ses principaux tracas ces douze derniers mois. A peine installé, le ministre de l'Intérieur Herbert Kickl, un idéologue du parti, a ainsi fait part de sa volonté de "concentrer" les demandeurs d'asile dans des centres fermés, avant de faire machine arrière. Il est aussi à l'origine d'une perquisition controversée au siège des services de renseignement BVT, où de nombreux documents ont été saisis, alimentant en Europe les craintes de fuites vers Moscou. Le FPÖ est en effet lié par un accord de partenariat avec le parti Russie unie de Vladimir Poutine.

Le président russe s'est d'ailleurs empressé de répondre à une invitation au mariage de la ministre apparentée FPÖ Karin Kneissl cet été. En pleine présidence autrichienne de l'UE, la cheffe de la diplomatie autrichienne a gratifié le maître du Kremlin d'une profonde révérence après avoir valsé avec lui.

Malgré ses efforts pour tenter de se rapprocher des dirigeants israéliens, M. Strache n'a pas réussi à obtenir une levée du boycott infligé par l'Etat hébreu aux représentants du FPÖ, un parti fondé par d'anciens nazis.

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