Bruxelles - Les États-Unis désormais isolés sur la scène internationale après leur retrait de l'accord de Paris sur le climat, l'UE et la Chine se sont affichées comme les nouveaux porteurs de flambeau de la diplomatie climatique.

Les réactions ont fusé des quatre coins de la planète - dans la sphère politique mais aussi économique - entre stupeur, colère et effarement, mais aussi détermination à poursuivre l'effort collectif promis à Paris.

Coïncidence des agendas, le sommet annuel UE-Chine organisé le vendredi 2 juin dernier à Bruxelles - au lendemain de l'annonce par le président Trump du retrait des Etats-Unis de l'Accord sur le climat - a offert une tribune aux deux partenaires pour clamer haut et fort leur engagement commun.

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Anomalies de la température depuis la fin de l'ère industrielle à 2016.

 

"Aujourd'hui, nous accroissons notre coopération sur le changement climatique avec la Chine", a assuré le président du Conseil européen à l'issue de la rencontre.

Toutefois, une déclaration conjointe, attendue, n'a pu être signée en raison d'un désaccord sur le contentieux commercial, a confirmé une source européenne. "Il n'y a pas de problème ni avec le climat ni avec l'accord de Paris", a insisté cette source.

Dès le début de la journée, le patron de la Commission européenne Jean-Claude Juncker avait dessiné les contours du nouveau moteur dans la lutte contre le changement climatique.

"Notre partenariat (avec la Chine) aujourd'hui est plus important que jamais", a assuré M. Juncker. Et la lutte contre le changement climatique, "plus importante aujourd'hui qu'hier", a avancé le chef de l'exécutif européen en guise d'introduction.

La Chine, plus discrète que l'UE sur le sujet à Bruxelles, s'est tout de même dite prête à "chérir le résultat chèrement gagné" à Paris.

Aux côtés de Pékin, l'engagement des États-Unis de Barack Obama avait largement participé à la réussite de l'accord de Paris, signé en décembre 2015 par plus de 190 pays et qui vise à contenir la hausse de la température moyenne mondiale "bien en deçà" de 2°C par rapport à l'ère pré-industrielle.

Le retrait américain de cet accord pourrait, "dans le pire des scénarios", se traduire par une augmentation supplémentaire de 0,3 degré de la température du globe au cours du 21ème siècle, a estimé l'ONU.

Dans le concert de condamnations, peu de voix discordantes se sont fait entendre. Parmi elles, le président russe Vladimir Poutine s'est refusé à "condamner" son homologue américain, plaidant pour un "travail en commun" avec les États-Unis.

Dans un long discours, Donald Trump avait affirmé jeudi 1er juin que "l'heure (était) venue" pour son pays de quitter l'accord de Paris, tout en souhaitant pouvoir négocier un accord, ou renégocier l'actuel, et sans préciser quels engagements les États-Unis seraient prêts à prendre.

"Je ne pense pas que nous allons modifier nos efforts pour réduire (nos propres) émissions de gaz à effet de serre à l'avenir", a tenté de rassurer le lendemain le chef de la diplomatie américaine Rex Tillerson.

 

Plus déterminés que jamais

Peu avare de critique envers les États-Unis ces derniers jours, la chancelière allemande Angela Merkel a affirmé être "plus déterminée que jamais" à agir pour le climat après la claque infligée par Donald Trump.

La réponse des Européens a été immédiate et tranchante: s'ils "regrettent" cette décision, Berlin, Paris et Rome ont souligné, dans un communiqué commun, que l'accord ne pouvait en aucun cas être renégocié.

Un traité international "engage un pays, pas un parti" politique, a vertement réagi Miguel Arias Cañete, commissaire européen à l'Action pour le climat et négociateur à Paris. Selon lui, les États-Unis n'ont pas tiré les leçons de Kyoto, précédent accord sur le climat auquel ils n'avaient pas participé.

Donald Tusk a qualifié la décision de Trump d'erreur encore "plus grosse" que celle de ne pas ratifier le protocole de Kyoto.

Les Nations Unies, qui chapeautent l'accord, ont fait part de leur "grande déception".

"On ne peut pas arrêter l'action concernant le climat", pas plus que le changement climatique est indéniable, a noté le secrétaire général des Nations-Unies Antonio Gutteres.

En opposition au président américain qui affiche sa volonté de soutenir les énergies fossiles au nom de la défense de l'emploi, les Européens, mais aussi le Brésil ou la Nouvelle-Zélande, ont réitéré que la transition énergétique est un facteur de croissance.

L'Inde, dans le top cinq des principaux pollueurs, a appelé au respect de l'accord de Paris.

 

Revers pour le leadership américain

La décision de Donald Trump va au-delà de la question climatique. Elle donne une indication sur le rôle que les États-Unis sous la direction du leader républicain entendent jouer sur la scène internationale dans les années à venir.

Aux États-Unis, de nombreuses figures du monde économique ont fait part de leur déception, et ont insisté sur l'urgence d'agir face au réchauffement.

{{carousel name="_,^""/}}Elon Musk, par exemple, le très médiatique PDG du constructeur de voitures électriques Tesla et ardent défenseur des énergies renouvelables, a immédiatement quitté un poste de conseiller de Donald Trump.

De New York à la Californie, plusieurs dizaines de villes et d’États américains ont immédiatement organisé la résistance, promettant qu'au niveau local l'Amérique continuerait d'avancer vers une économie verte.

Barack Obama a amèrement regretté l'arbitrage de son successeur, mais gardait espoir que "nos États, villes et entreprises seront à la hauteur et en feront encore plus pour protéger notre planète pour les générations futures".

L'objectif des États-Unis, fixé par l'administration Obama, était une réduction de 26% à 28% de leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici 2025 par rapport à 2005.

La procédure de retrait, prévue par l'article 28 de l'accord de Paris, devrait reporter le retrait effectif en 2020. Cependant, a pris soin de préciser M. Trump, les États-Unis cessent "dès aujourd'hui" son application.

Au-delà de la secousse que représente cette annonce, l'inquiétude est réelle concernant les financements, tant pour la Convention climat de l'ONU (23% du budget apportés par les Américains) et l'aide internationale aux pays les plus pauvres, à l'instar du Fonds vert.

Par Marine Laouchez, avec Jérôme Cartillier à Washington

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